Sujet :
la catégorie Bénéfices industriels et commerciaux
Introduction :
Le revenu
imposable est constitué par l’ensemble des revenus net de différentes
catégories de revenu et chacune de ces derniers est régie par une panoplie de
règles propres de détermination du revenu imposable. D’ailleurs le législateur
a consacré dans le code de l’impôt sur le revenu sept catégories. A ce niveau, les
bénéfices industriels et commerciaux constituent une catégorie de revenu bien déterminé
qui est définie, selon les termes de l’article 9 du code de l’impôt sur le
revenu et l’impôt des sociétés, comme étant « les bénéfices réalisés dans
des entreprises exerçant une activité
commerciale au sens du code de commerce ».
D’avantage
cette catégorie a connu une évolution historique importante. Les dynasties arabes qui se sont
succédé en Tunisie, depuis le milieu du XII siècle ont établi un système fiscal
très amélioré renfermant des impôts de nature extra religieuse frappant la
production et le commerce sous l’appellation du « Maalim, Mkous ». Selon
le professeur HBIB AYADI « on reconnait d’ailleurs, dans le système
fiscal appliqué par les Aghlabides et surtout les Fatimides, les germes et l’esprit des systèmes fiscaux appliqués en
Europe au XVIII.». Quelques siècles plus tard, avec les Husseinites on a
assisté à l’émergence des taxes très
disparates appelées « les patentes » en tant que un impôt qui frappe
le commerce de certain denrées ou produits alimentaires. Pendant l’ère du
protectorat, les patentes ont connu diverses modifications dont la plus
importante était celle introduite par le décret du 31/12/1917 qui a remplacé
les différents droits de licences par un droit général de patente frappant
l’exercice des commerces, industries et professions. Cet impôt empruntait ses
principes aux mécanismes de l’impôt cédulaire français sur le BIC.
De même, le
droit de la patente a constitué un impôt de transition dans le système
d’imposition des revenus. Il est le premier
impôt basé sur un bénéfice net. A la lumière de l’indépendance, en 1986
la cédule des BIC a subi une importance modification qui est inspirée de celle
introduit en France en 1948. En effet, la loi du 31/12/1985 a séparé l’imposition
des personnes physiques de celle des personnes morales en remplaçant l’impôt
sur la patente par deux impôts distincts : BIC pour les personnes
physiques et l’IS pour les sociétés de capitaux. De puis cette réforme et
jusqu’en 1989, les BIC restaient soumis à la fois à l’impôt cédulaire, à la
contribution exceptionnelle de solidarité et à un impôt sur le revenu global constitué par la contribution
personnelle d’Etat. Avec l’introduction de la réforme de 1989, le législateur a
supprimé les différents impôts cédulaires ainsi que l’impôt général et il les a
remplacés par impôt unique sur le revenu. Celui-ci s’applique à un revenu
global dont la catégorie des BIC constitue l’une de ses composantes.
Sur le plan
théorique, la catégorie des bénéfices
industriels et commerciaux a suscité un débat concernant la légitimité de leur
imposition. Les physiocrates ont dénoncé toute sorte d’impôt atteignant les
revenus d’une activité industrielle et commerciale. Ils ont formulé une théorie
fiscale originale pourtant de l’idée « que toute richesse vient du sol,
seul le revenu ou la rente des propriétaires des terres doit être frappé par
l’impôt ». Cette conception a été largement contestée par les libéraux.
C’est avec les libéraux qu’avaient commencé, alors les prémices d’une
imposition moderne des BIC. La légitimité de l’imposition des BIC n’a pas cessé
de s’affirmer au fil de ces derniers
siècles d’ailleurs. D’ailleurs le domaine des BIC est entrain de se valoriser
au détriment du domaine foncier et du domaine agricole.
En Tunisie
la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux a favorisé l’émergence d’un débat doctrinal. La
consécration du régime forfait d’impôt au sein de l’imposition des BIC était,
l’un des reproches qui ont été adressé à la réforme de 1989 par la doctrine.
Ainsi, en dépit de son importance, la réforme de 1989 n’a pas été aussi
radicale qu’on pourrait le penser. D’ailleurs, une quinzaine d’année après son
entrée en vigueur l’imposition des BIC demeure complexe quant à sa conception
et quant à ses effets. C’est pour cela le professeur Néji BACCOUCHE a parlé
notamment de cette complexité « le droit Tunisien, à l’instar d’autres
systèmes, n’a pas se débarrasser de cette complexité qui caractérise l’assiette
de l’impôt ».
Dans quelle
mesure peut-on considéré que la catégorie des bénéfices industriels et
commerciaux a subi une véritable réforme
en 1989 qui se manifeste au niveau la détermination du champ d’application du
revenu imposable alors que la réforme de la catégorie BIC est relativisé par l’émergence de certaines
complexité qui découle essentiellement de la multiplicité des régimes de
détermination applicable sur le revenu imposable de cette catégorie ?
L’étude de
la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux se manifeste au niveau la
détermination du champ d’application de cette catégorie (parti I) et au niveau
la multiplicité des régimes de détermination du revenu imposable dans les
différents étapes (parti II)
I)
Le champ d’application de la catégorie des bénéfices industriels et
commerciaux :
Le champ
d’application de cette catégorie est déterminé au niveau les activités relevant
des bénéfices industriels et commerciaux (paragraphe A) et au niveau la
territorialité et les personnes
imposables (paragraphe B).
A) Les
activités relevant de la catégorie des bénéfices industriels et
commerciaux :
Depuis l’entrée en vigueur du code de l’IRPP et de l’IS en 1990, la
législation fiscale a rejoint la législation commerciale en ce qui concerne la
définition des bénéfices qui relèvent de la catégorie des BIC. A ce titre,
l’article 9 du code de l’IRPP et l’IS définit
les BIC comme étant « ceux réalisés dans des entreprises exerçant
une activité commerciale au sens du code de commerce ». A cet effet,
l’article 2 du code de commerce
considère comme opérations commerciales, même si certaines ne peuvent être
exercées que par des sociétés anonyme, notamment ;
-l’extraction
de matières premières ;
-la
fabrication et la transformation des produits manufacturés ;
-l’achat de
la vente ou la location des biens, quels qu’ils soient ;
Le transport
terrestre, maritime et aérien des biens et des personnes ;
-les
opérations d’assurance terrestre, maritime et aérienne ;
-les
opérations de change, de banque ou de bourse
-les
opérations de commission et de courtage, c'est-à-dire les opérations
d’intermédiation réalisées par des personnes indépendantes qui mettent en
rapport des clients et des fournisseurs de biens ou de service ;
-l’exploitation
d’agences d’affaires ;
-l’exploitation
d’entreprises de spectacles publics ;
-l’exploitation
des entreprises de publicité, d’édition, de communication ou de transmission de
nouvelles et de renseignements ;
De même, le
courtier conserve la qualité de commerçant même lorsque le courtage a pour
objet des opérations de nature non commerciale. A titre d’exemple, les revenus
professionnels des courtiers en produits agricoles qui mettent en relation des
producteurs agricoles et les acheteurs éventuels, sont rangés dans la catégorie
des bénéfices industriels et
commerciaux.
D’avantage,
les commerçants, industriels et prestataires de services commerciaux personnes
physiques relèvent de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Il
en est ainsi les artisans qui ont un statut particulier, sont intégré dans le
champ de cette catégorie puisque la doctrine administrative assimile aux
bénéfices industriels et commerciaux, les bénéfices des activités artisans sur
la base des dispositions de l’article 51 du code l’IRPP et de l’IS. Faut il
ajouter d’emblée que la location d’immeubles d’habitation meuble et l’hébergement des étudiants par propriétaire
personne physique génèrent, par conséquent, un revenu qui relève de la
catégorie des BIC.
Toutefois,
le seul exercice de l’une des activités susvisées ne suffit pas en lui-même
pour faire de la personne qui l’exerce, un commerçant ; il faut que
l’activité soit exercée à titre professionnel, pour le compte de la personne
qui l’exerce et dans but lucratif. En
effet, l’exercice de l’activité suppose que la personne qui accomplit des actes
de commerce en fait sa profession, dans le sens où elle doit se consacrer à
titre principal à l’exercice de cette activité. Ce critère est satisfait chaque
fois qu’il y a répétition des opérations même à des intervalles de temps pas
très rapprochés. De même, l’exercice de l’activité commerciale pour son propre
compte à ses risques et périls distinguerait
seul le commerçant de simple subordonnée qui travaille sous ordres. D’ailleurs,
ce qui distingue un subordonnée d’un commerçant,
c’est que le premier a la garantie d’un revenu minimum alors que le deuxième
n’est pas ne mesure de se fixer sur ses résultats à l’exercice. Enfin, la
spéculation et la recherche du profit sont les éléments caractéristiques de
l’exercice d’une activité commerciale.
Toutefois,
ne sont pas considérées comme activités commerciales dont les bénéfices ne sont
pas soumis à l’impôt sur le revenu à ce titre, notamment ;
La vente par
les agriculteurs de leur propre production, même après une première
transformation. Il en est ainsi la vente par les peintres de leurs œuvres
d’art. Cependant lorsque les intéressés se livrent à la reproduction en séries
d’une même œuvre, les bénéfices réalisés à ce titre sont soumis à l’impôt sur
le revenu au titre de la catégorie des BIC.
B) Territorialité
et les personnes imposables du BIC :
Dans le cas
des exploitants individuels qui disposent et leur lieu de résidence habituelle
en Tunisie et sous réserve de la déduction des bénéfices non imposables,
les bénéfices servant de base pour le paiement de l’impôt sur le revenu sont
ceux réalisés aussi bien en Tunisie qu’à l’étranger, sauf le cas des bénéfices
ayant été effectivement soumis à un impôt de même nature dans l’Etat d’origine.
Dans la pratique, le régime d’imposition des revenus ou bénéfices de source
étrangères n’est pas très cohérent surtout lorsque ces derniers sont rattachés
à une exploitation individuelle située en Tunisie, dans le sens où les bénéfices industriels et commerciaux de
source « étrangère » perdent ce caractère et sont soumis à l’IRPP au
titre de la catégorie « autres revenus ».
Tout de
même, l’exploitant individuel qui dispose d’un fond de commerce en Tunisie et
d’un autre fonds à l’étranger, est considéré comme disposant de deux catégories
de revenus alors qu’il n’exerce en fait
qu’une seule activité, ce qui méconnaît l’unicité du résultat commercial et
risque de faire subir à un exploitant individuel l’impôt sur le revenu sur la
base des bénéfices de source étrangère alors que son résultat fiscal d’ensemble
au titre de la catégorie des BIC peut
être déficitaire. Il en est de même des revenus réalisés à l’étranger et
générés directement par l’exploitation situé en Tunisie, tels que les revenus
des placements qui, même financés par prélèvement sur des fonds de
l’exploitation située en Tunisie et
inscrits à son actif, perdent le caractère de produits accessoires par
rapport à l’activité commerciale sont
soumis à l’impôt sur le revenu au titre
de la catégorie « autres revenus ».
Faut-il
ajouter aussi que la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux englobe
les bénéfices réalisés par les personnes physiques qui ne disposent pas de leur
lieu de résidence habituelle en Tunisie. Sous réserve des dispositions de
conventions internationales de non double imposition et des exonération prévus
par le code de l’impôt sur le revenu et de
l’impôt sur les sociétés, les bénéfices industriels et commerciaux de
source Tunisienne, y compris les revenus passifs qui leur sont rattachés, tels que les revenus capitaux
mobiliers, réalisés en Tunisie par les personnes qui n’y ont pas leur lieu de
résidence habituelle rentrent dans le champ d’application de l’impôt sur le
revenu, même lorsqu’ils ne sont pas imputables à un établissement stable situé
en Tunisie, que l’activité soit exercée en Tunisie ou à l’étranger.
A la lumière
de cette analyse, on peut déduire que le champ d’application de la catégorie
BIC se manifeste au niveau les activités qui relèvent des bénéfices industriels
et commerciaux et au niveau des personnes imposables qui englobe à la fois le
critère de résidence et celle de la source du revenu réalisée en Tunisie. D’où les bénéfices
réalisés par les personnes physiques qui
disposent en Tunisie de leur lieu de résidence habituelle et les revenus réalisés
par les personnes physiques qui ne disposent pas de leur lieu de résidence
habituelle en Tunisie. Reste seulement à signaler que la catégorie des
bénéfices industriels et commerciaux
favorise l’étude de la multiplicité des régimes applicables dans le
processus de détermination du revenu imposable
II)
la multiplicité des régimes applicables
dans le processus de détermination du revenu imposable du BIC :
Cette
multiplicité se traduise essentiellement au niveau le régime applicable dans
l’étape de détermination (paragraphe A) et au niveau le régime applicable dans
l’étape de liquidation (paragraphe B)
A) le
régime applicable dans l’étape de détermination de la catégorie du BIC :
Notons dés l’abord que les personnes physiques font parti de la catégorie
des bénéfices industriels et commerciaux peuvent opter pour le régime réel ou
bien le régime réel simplifiée. En effet, pour le régime réel, les règles de
détermination du résultat fiscal sont fixées par les articles 10 à 15 du code
de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et l’impôt des sociétés. Elles
sont examinées de façon détaillée au chapitre 4 du titre II. Le paragraphe I de
l’article 11 de l’IRPP et l’IS définit « résultat net » comme étant
celui « déterminé d’après les résultats d’ensemble des opérations de toute
nature effectués par l’entreprise, y compris notamment la cession de tout
élément d’actif ».
De ce fait et à l’instar de la définition fiscale, le résultat net
comptable comprend aussi bien les produits et les charges découlant des
opérations de l’entreprise, que les éléments non liés aux activités ordinaires
et cette dernière. faut il ajouter aussi
que l’imposition selon le régime réel implique des obligations
comptables à savoir la tenue d’une comptabilité d’engagement conformément au
système de comptabilité des entreprises dont le fait générateur de l’imposition
est la créance acquise qui signifie la réalisation des créances et des dettes
abstraction de l’encaissement et du décaissement. D’ailleurs, l’article 62
codes de l’IRPP et l’IS consacre ce type de comptabilité perfectionnée. Certes le
régime réel en tant que un mode de détermination de l’assiette sur la base des
opérations et des montants réels réalisés par l’entreprise, favorise une
panoplie de formes d’incitations de droit commun et il est plus adapté au
statut d’assujetti à la TVA mais c’est un régime complexe et à coût
administratif élevé.
En tout état de cause, l’imposition selon le régime réel peut dégager un
résultat bénéficiaire comme elle peut dégager un résultat déficitaire qui peut
s’imputer sur les autres catégories de revenus et en cas d’insuffisance, se
reporter en avant sur les années suivantes.
D’une autre coté, pour le régime réel simplifié, les personnes physiques
soumises à l’impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et
commerciales sont soumises à des obligations comptables fiscales simplifiées.
Ces obligations se limitent à tenir un
registre coté et paraphé par les services du contrôle fiscal sur lequel sont
portés au jour le jour les produits bruts et les charges sur la base des pièces justificatives. Ainsi que
la tenu d’un livre d’inventaire coté et paraphé par le service du contrôle
fiscal où sont enregistrés annuellement les immobilisations et les stocks.
Pour conclure, le résultat net des exploitations individuelles éligibles
u régime réel de la comptabilité simplifiée est déterminé dans les mêmes
conditions que les entreprises soumises au régime réel.
b) le régime applicable dans l’étape de
liquidation de la catégorie du
BIC :
par dérogation au principe général selon lequel l’impôt sur le revenu est
liquidé sur la base des résultats réels déterminés à partir d’une comptabilité
conforme à la législation comptable des entreprises ou d’une comptabilité
simplifiée, les petits exploitants peuvent être soumis à un impôt sur le revenu
forfaitaire fixé sur la base du chiffre d’affaires, sauf le cas particulier des
personnes ayant réalisé des plus values sur la cession de fonds de commerce.
D’avantage, le régime du forfait d’impôt spécifique à la catégorie de
l’activité industrielle, commerciale et artisanale des personnes physiques est
de loin le régime le plus répandu dans le paysage fiscal tunisien. L’article 44 bis du code de l’IRPP et l’IS
consacre une compilation de conditions cumulatives pour bénéficier du régime forfait d’impôt. Ce dernier a été
largement adopté par les contribuables grâce à ces avantages. D’ailleurs les
forfaitaires constituent environ 78% des
contribuables personnes physiques relevant de la catégorie des bénéfices
industriels et commerciaux, mais leur contribution aux recettes fiscales
d’impôt sur le revenu est insignifiante puisque la doctrine considère que le
forfait d’imposition désigne « un terrain favorable pour la fraude » (l’article du professeur SAMI
KRAIEM et MOHAMED KOSSENTINI).
Reste seulement signaler que le droit tunisien institue deux types de
forfait d’impôt à savoir le forfait légal et le forfait optionnel. Faut-il
ajouter encore que le retrait du régime forfaitaire suite à la décision de
l’administration et le déclassement au régime réel d’imposition prennent, en
termes d’obligations fiscales qui incombent normalement aux personnes soumises
au régime réel, à partir du 1 er janvier de l’année qui suit celle du retrait.
En cas de confirmation par le tribunal de la décision de l’administration, et
dés lors que le chiffre d’affaires n’a pas fait l’objet d’une vérification, les
contribuables dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas 100.000 D peuvent être
soumis à l’impôt sur le revenu sur la base d’une comptabilité simplifiée. Cela
signifie que le législateur a consacré dans l’article 44 bis du code de l’IRPP
certain rigidité au niveau des normes ou des conditions d’éligibilité au régime
forfait d’impôt dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux afin
de limiter l’accès abusive et proliférée à ce régime.